Rio 2018 : Portrait de Sébastien Gouëzel, conférencier invité
Interview de Sébastien Gouëzel, directeur de recherche au CNRS, conférencier dans la section "Systèmes dynamiques et équations différentielles ordinaires".
Quel est votre domaine de recherche ?
Je travaille principalement en systèmes dynamiques : il s’agit de comprendre comment un système évolue au cours du temps, particulièrement en temps long. Parfois, l’asymptotique est très simple (convergence vers un point fixe), parfois au contraire la dynamique reste très complexe (dynamique chaotique, souvent représentée pour le grand public par "l’effet papillon" : de petites modifications des conditions initiales modifient énormément le futur des trajectoires). Plus précisément, je m’intéresse au lien entre systèmes dynamiques et probabilités : comment des comportements de type aléatoire vont-ils émerger dans des systèmes complètement déterministes. Par exemple, quand on lance un dé, les lois des rebonds sur la table sont déterministes, mais suffisamment complexes pour produire un résultat apparemment tiré au hasard. Donner un sens précis à ces affirmations et dire quels systèmes donnent effectivement lieu à ce type de comportement est un domaine de recherche très riche. C’est un champ à l’interface entre l’analyse, la géométrie et les probabilités, ce qui le rend pour moi passionnant. Et cela m’a donné l’occasion de faire des incursions dans ces trois domaines et de collaborer avec des gens venus d’horizons très différents !
Qu’est-ce que vous aimez dans votre métier de mathématicien ?
Il y a ces moments où l’on est complètement focalisé sur une question précise, qu’on veut absolument comprendre et qu’on a tellement mâchée et remâchée dans toutes les directions qu’on est persuadé d’en connaître intimement tous les aspects, sans pour autant arriver à la résoudre. Et parfois, on entrevoit un nouveau point de vue, presque par hasard, qui semble incongru au début, naïf souvent, et pourtant on sait tout de suite que c’est la clé qui manquait, qui va s’imbriquer avec toutes les techniques classiques pour résoudre le problème. Cela va encore demander beaucoup de temps, de travail, de tâtonnements et d’obstination aussi, mais le plus dur est fait.
Savez-vous déjà ce que vous allez raconter à l’ICM à Rio ?
J’hésite encore. La difficulté est de trouver un thème qui puisse donner lieu à un exposé de semi-vulgarisation, qui s’adresse à des mathématiciens d’autres domaines et fasse passer des idées profondes sans être trop technique. Je parlerai peut-être de résonances de Ruelle pour les difféomorphismes pseudo-Anosov.

(LMJL - CNRS & Université de Nantes).