Résultats de l’appel à projet ERC Consolidator Grant 2021

Récompenses/Nominations

L’ERC a publié les résultats de son appel à projets Consolidator Grant 2021. Ce programme s’adresse aux chercheurs et chercheuses qui ont soutenu leur thèse depuis une durée comprise entre 7 et 12 ans. Raphaël Beuzart-Plessis, chargé de recherche CNRS, et Christophe Garban, professeur à l’Université Claude Bernard, lauréats 2021 en mathématiques, présentent ici leurs projets.

Toutes disciplines confondues, 313 projets ont été retenus parmi lesquels 7 en mathématiques. Deux de ces projets sont portés par des collègues membres d’unités Insmi :

  • Raphaël Beuzart-Plessis, chargé de recherche CNRS affecté à l’Institut de mathématiques de Marseille (I2M, UMR7373, Aix-Marseille Université/CNRS), porte le projet Relative Langlands Functoriality, Trace Formulas and Harmonic Analysis (Relantra) ;

Présentation du projet RELANTRA

Description à retrouver sur le site de la délégation CNRS Provence et Corse

Le programme de Langlands consiste en un réseau de vastes et profondes conjectures reliant deux champs mathématiques a priori distincts que sont la théorie des nombres et la théorie des représentations. Au cœur de ce programme se trouve un principe fondamental de « fonctorialité », qui postule l'existence de relations profondes et mystérieuses entre les représentations automorphes de différents groupes, ainsi que des objets analytiques centraux appelés fonctions L automorphes. Récemment, un nouveau point de vue particulièrement prometteur sur ces notions est apparu sous le nom de programme de Langlands relatif. Celui-ci consiste essentiellement à remplacer les groupes par certains espaces homogènes et à considérer leurs spectres automorphes ou locaux.

Tout comme pour le programme de Langlands classique, les formules des traces sont un outil essentiel dans le cadre relatif à la fois pour démontrer certaines conjectures centrales du sujet mais aussi pour approfondir notre compréhension globale des principes sous-jacents. L'un des thèmes principaux de ce projet est précisément de contribuer à un niveau fondamental au développement de ces formules des traces et plus particulièrement : (1) D'étudier de façon systématique le développement spectral de certaines formules des traces simples notamment en présence d'un automorphisme extérieur (formule des traces tordue) (2) D'obtenir des formules des traces locales relatives dans un cadre très général pour les variétés sphériques en établissant de nouvelles connections originales avec la géométrie des fibrés cotangents. Ces résultats de grande portée nous permettrons aussi d'établir de nouveaux cas importants de correspondances/fonctorialités de Langlands relatives. Dans une direction légèrement différente, je prévois aussi d'étudier et de développer d'autres outils d'analyse harmonique dans le contexte relatif. Cela inclut certaines formules de Plancherel explicites ainsi qu'un type complétement nouveau de théorèmes de Paley-Wiener, avec des applications potentielles à certaines comparaisons de formules des traces globales et à la factorisation de périodes automorphes.

  • Christophe Garban, professeur à l’Université Claude Bernard et membre de l’Institut Camille Jordan (ICJ, UMR5208, CNRS/École centrale de Lyon/Insa de Lyon/Université Claude Bernard/Université Jean Monnet), porte le projet Spin systems with discrete and continuous symmetry: topological defects, Bayesian statistics, quenched disorder and random fields (Vortex).

Présentation du projet VORTEX

Présentation du projet Vortex

Le projet VORTEX est un projet en mathématiques qui se situe au carrefour des probabilités et de la physique mathématique. L'un des buts principaux de ce projet est de comprendre la géométrie aléatoire sous-jacente aux "transitions de phase topologiques" qui ont été découvertes dans les années 1970 par Berezinskii, Kosterlitz et Thouless (N.B. la moitié du prix Nobel de physique 2016 a été décerné à Kosterlitz et Thouless pour cette découverte). Aubaine pour les mathématiciens, ces transitions de phase apparaissent dans des "systèmes de spins" simples à définir mais dont les propriétés sont étonnamment riches. L'archétype d'un tel modèle est le "modèle XY" 2d. Celui-ci généralise le célèbre modèle d'Ising de la manière suivante : dans le modèle d'Ising 2d, chaque point d'un réseau 2d porte un spin à valeurs dans {-1,+1} alors que dans le modèle XY, les spins prennent leurs valeurs dans le cercle unité. On passe alors d'une symétrie discrète à une symétrie continue et la nature de la transition de phase change drastiquement. Contrairement au cas du modèle d'Ising, Berezinskii, Kosterlitz et Thouless ont compris que des modèles à symétrie continue et Abélienne tels que le modèle XY passent d'un état désordonné à haute température à un état de "quasi-ordre" à longue portée, et que cette transition d'un nouveau type est due à la présence de "défauts topologiques" appelés Vortex. La compréhension mathématique de cette transition est due à Fröhlich et Spencer dans les années 1980 et met en jeu une transition de phase associée pour le gaz de Coulomb 2d.

L'objectif de ce projet sera d'étudier la géométrie fractale aléatoire qui apparaît au cours de ces transitions de phase. En plus d'outils probabilistes de type "percolation" (qui ont joué un rôle primordial ces 20 dernières années dans la compréhension fine de modèles à symétrie discrète tels que le modèle d'Ising), de nouveaux outils seront développés parmi lesquels les travaux récents du PI avec Sepúlveda sur les gaz de Coulomb ou encore ses travaux avec Spencer qui créent des liens avec les statistiques bayésiennes. L'étude du comportement des défauts topologiques dans des modèles 2d tels que le modèle XY sera étendue au cas de la "théorie de jauge Abélienne sur réseau" en dimension 4 où les défauts topologiques jouent un rôle similaire et contribuent cette fois à une transition de phase de type confinement/déconfinement. Les connections récentes établies avec des problèmes de reconstruction statistique permettront d'explorer certains aspects des modèles de spins à symétrie continue non-Abélienne qui demeurent à ce jour bien plus méconnus. Une autre partie du projet se concentrera sur les mécanismes qui relient le bruit microscopique ambiant dans un système avec les structures macroscopiques engendrées par ce bruit dans des contextes tels que la théorie quantique des champs ou la classe d'universalité du point fixe KPZ. Pour mener à bien ce projet, Christophe Garban sera entouré de deux chercheurs permanents, Jean-Marie Stéphan, CR CNRS en physique théorique à l'Université Lyon 1 et Avelio Sepúlveda, professeur assistant à l'Universidad de Chile, Santiago, ainsi que de 3 chercheurs postdoctoraux et 2 doctorants.

Félicitations !

Lien vers l'ensemble des lauréates et lauréats ERC Consolidator 2021